Séminaire de l’EHESS : « Une histoire matérielle de la musique et des arts du spectacle (XVIe – XXe siècle) »

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Du 22 octobre 2021 au 3 juin 2022, la Bibliothèque musicale La Grange-Fleuret a le plaisir d’accueillir un séminaire animé par Rémy Campos, professeur au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris / Centre Georg-Simmel (CGS), et Anne-Madeleine Goulet, directrice de recherche au CNRS.

Du XVIe siècle au début du XXe siècle, la réflexion théorique a mis à profit un ensemble de notions (richesse, propriété, échange, travail, capital, production, consommation, etc.) qui ont servi à penser la manière dont les sociétés humaines s’organisaient, pour plier le monde naturel à leurs besoins et pour garantir un bon gouvernement. Ces discours se sont inscrits dans ce qu’on a appelé, à partir du XVIIIe siècle, l’économie politique.

Les ouvrages publiés dans ce domaine réservent une place aux arts, généralement abordés dans les chapitres consacrés aux produits immatériels, à la consommation ou au luxe. Les pratiques artistiques y sont le plus souvent associées aux polémiques sur les dépenses superflues et à la condamnation morale du luxe. La place secondaire de la musique et des arts du spectacle dans le discours de l’économie politique s’explique en partie par le manque de compétences artistiques des auteurs mais sans doute aussi parce que certains peinaient à envisager les activités économiques dans leur dimension concrète.

Le présent séminaire fait l’hypothèse qu’il est pertinent de s’interroger sur la manière dont savoir-faire et réflexions théoriques s’articulaient dans le domaine de la musique et des arts de la scène. Cette interrogation revêt une importance d’autant plus grande que les discours savants ont largement occulté les savoirs que mettaient en œuvre sur le terrain des acteurs sociaux formalisant leurs pratiques selon des modes extrêmement variés. En 2006, l’ouvrage collectif Écrire, compter, mesurer. Vers une histoire des rationalités pratiques, dirigé par Natacha Coquery, François Menant et Florence Weber, a montré l’intérêt d’une approche des réalités économiques d’Ancien Régime prenant en compte des techniques intellectuelles (écritures comptables, systèmes de mesure, etc.) non académiques.

Pour la période qui a précédé l’émergence de l’économie politique comme discipline, on explorera notamment la notion d’économie domestique. Elle prévalait dans les maisons aristocratiques ainsi que dans celles de la haute bourgeoisie et elle n’était pas alors dissociée de la charité, de la morale ou de la civilité. En adoptant une perspective de cinq siècles, du XVIe siècle au milieu du XXe siècle, on pourra aussi évaluer jusqu’à quel point l’économie domestique est demeurée présente dans les pratiques et dans les formalisations modernes de l’économie artistique.

Le séminaire a pour but :
1) d’envisager la musique et les arts du spectacle dans des cadres différents de ceux auxquels on les rapporte d’ordinaire (cadres esthétique et formel, philologiques, techniques et professionnels, institutionnels, didactiques, etc.) ;
2) de considérer ces arts dans la longue durée ;
3) d’expliquer des phénomènes qui n’ont pas forcément été théorisés en leur temps ;
4) d’élaborer des outils d’analyse adaptés.

Pour ce faire, on envisagera un large éventail de sources : ouvrages théoriques, essais, brochures polémiques, articles de presse, documents liés à la production de concerts et de spectacles, celles que l’on regroupe sous le vocable d’« écritures pratiques » tels que documents comptables, juridiques ou notariés, etc. La méthode consistera à procéder par études de cas en mettant en rapport un dossier documentaire avec une notion contemporaine, ou un ensemble de notions, puisées selon les époques dans des essais de théorisations ou dans des corpus théoriques constitués.

Les séances permettront à des spécialistes de diverses disciplines de présenter des recherches en cours et à des doctorants en histoire, en musicologie et en arts du spectacle de tester la pertinence des notions économiques pour leurs propres travaux.

Le séminaire pourra être suivi en ligne (lien zoom à demander aux organisateurs).

Les auditeurs désirant suivre la séminaire en présentiel à la Bibliothèque musicale La Grange-Fleuret doivent s’inscrire auprès des organisateurs et être munis d’un passe sanitaire.

22 octobre 2021 : Étienne Anheim (EHESS)
Discutante : Véronique Dominguez-Guillaume

12 novembre 2021 : Philippe Canguilhem (Université de Tours/Centre d’études supérieures de la Renaissance)
Discutante : Florence Alazard (CESR)

17 décembre 2021 : Francesca Fantappiè (CESR)
Discutante : Élodie Oriol (École française de Rome)

21 janvier 2022 : Christophe Charle (sous réserve)
Discutant : Rémy Campos

18 février 2022 : Martial Poirson (Université Paris 8)
Discutant : Loïc Charles (Institut national d’études démographiques)

25 mars 2022 : Rahul Markovits (ENS – Paris)
Discutant : Arnaud Orain (Université Paris 8)

15 avril 2022 : Thierry Favier (Université de Poitiers)
Discutante : Pauline Lemaigre-Gaffier (Université Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines/Université Paris-Saclay/Dypac)

3 juin 2022 : Pierre-Michel Menger (Collège de France/École des hautes études en sciences sociales)
Discutant : Gabriel Galvez-Behar (Université de Lille)

Ce séminaire est ouvert à tout public, sur réservation auprès de l’équipe de la Bibliothèque ou de Rémy Campos et Anne-Madeleine Goulet.

Partenariat : EHESS, Bibliothèque Musicale La Grange-Fleuret, Centre d’études supérieures de la Renaissance de Tours – UMR 7323 du CNRS